ActualitésExplications météo de Marc

Que s’est-il passé à Valence ?

Les 29 et 30 octobre, des inondations ont frappé Valence, mais également la région de Barcelone, les Baléares et l’Andalousie. Beaucoup de choses ont été dites comme la goutte froide, mais les causes sont bien plus complexes que ce qui a été rapporté dans les médias.

Dégâts des inondations à Sedavi près de Valence, 30 octobre 2024. © Union européenne, 2024, CC BY 4.0

Le phénomène est connu sous le terme épisode méditerranéen ou épisode cévenol. Ces phénomènes se produisent principalement en automne. Ils touchent le sud de la France, la côte méditerranéenne de l’Espagne, l’Italie et le Maghreb.

En été, l’anticyclone du Sahara remonte et couvre la Méditerranée. Il donne un temps sec et ensoleillé, type de temps très recherché par les touristes. Mais, il permet aussi à l’eau de mer de devenir très chaude avec des valeurs qui peuvent atteindre 30 °C. La mer Méditerranée étant une mer fermée, aucun courant froid vient tempérer cette mer. À la fin de l’été et au début de l’automne, elle est très chaude.

En automne, l’anticyclone du Sahara retourne vers le désert, permettant à des dépressions de se développer sur la mer. Dans une dépression, on a des ascendances qui permettent à la masse d’air de se charger en air chaud et très chargé en vapeur d’eau. Si la dépression est placée de telle manière à avoir des vents se dirigeant vers les terres, cela va amener des précipitations et des orages sur les régions côtières.

Mais un autre facteur va entrainer une intensité particulière des précipitations : le relief.

Pratiquement toute la côte méditerranéenne de l’Espagne (sauf l’estuaire de l’Elbe) est montagneuse. À l’ouest du Rhône, on a le massif central et à l’est, on a les contreforts d’Alpes. Toute la péninsule italienne est marquée par les Apennins. Le relief va provoquer des précipitations extrêmement intenses. Quand une masse d’air chargée de vapeur d’eau arrive à l’abord des massifs, l’air n’a qu’une possibilité : c’est de s’élever. En s’élevant elle arrive dans de l’air plus froid et la pression diminue. La masse d’air se dilate et en physique, on parle de dilatation adiabatique, c’est-à-dire sans échange d’énergie. Ce phénomène entraine un refroidissement de la masse d’air et comme la contenance en vapeur d’eau est limitée en fonction de la température – plus c’est froid, moins de vapeur d’eau est contenu dans l’air. En se refroidissant, il y a une partie de la vapeur d’eau qui doit passer à l’état liquide. Comme l’air en contient beaucoup au départ, les nuages contiennent beaucoup d’eau. Il en résulte sur le relief des pluies diluviennes. C’est ainsi que lors des épisodes méditerranéens, on peut avoir en 24 h des pluies qui tombent normalement en six mois, voire dans les cas extrêmes un an de précipitations. D’où les inondations catastrophiques qui se produisent lors de ces phénomènes.

Un dernier facteur récurrent au phénomène de goutte froide qui accentue dans ce cas le refroidissement dû au relief. Certains épisodes restent en mémoire comme celui de novembre 1966 conduisant à un débordement de l’Arno à Florence. Dans la cathédrale, l’eau est montée jusqu’à 5 m au-dessus du sol. Ce fut une des pires catastrophes culturelles de l’Italie. En septembre 1992, il y a eu la catastrophe de Vaison-la-Romaine. Plus récemment, début décembre 2003, il y a eu la crue du Rhône en Camargue. Les 19 et 10 novembre 2001, c’est à Babel-Oued, à Alger, que des inondations entrainèrent 781 morts et 115 disparus. À Valence, ce n’était pas une première, car la ville avait connu de grandes inondations le 14 octobre 1957.

La question que se posent nos concitoyens est de savoir si c’est possible en Belgique. La réponse est non. On peut connaitre de graves inondations comme en 2021, mais les mécanismes ne sont pas les mêmes. De plus les quantités de pluie en 24 h n’ont rien à voir à celles observées notamment à Valence où à certains endroits, il est tombé 800 mm de pluie en 24 h. Chez nous, la valeur officielle en 24 est un orage qui a donné plus de 140 mm dans la région anversoise le 13 septembre 1998 ; sur une période de 24 h non officielle, on a eu 168 mm à Brasschaat.

En résumé, pour un épisode méditerranéen, on doit avoir une mer très chaude à la fin de l’été, une dépression avec une masse d’air qui se dirige vers les terres, du relief montagneux, une goutte froide. Ces conditions ne se présentent pas chez nous.

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